mardi 10 avril 2012

LE VIN DE PAPOUSIE N’A PAS LE MONOPOLE DU POURPRE

« Moi, j’ai le goût qu’on se paie une corrida », avait exprimé quelques mois plus tôt cette amie de Carole qui prévoyait alors nous rendre visite à Barcelone. Joëlle adore les sensations fortes et ces manifestations rituelles à caractère historique et national que la mondialisation n’a toujours pas réussi à mettre en échec. Carole et moi décidons de l’accompagner à Madrid, entre autres pour tenter de mieux comprendre les raisons sous-tendant la récente décision de la Catalogne de rendre illégale l’organisation de corridas sur son territoire. 
 
Nous voici donc installés aux premières loges des Las Ventas, ces arènes situées au centre de la magnifique Plaza de toros de Madrid. Essayer de décrire en quelques lignes le spectacle qui se déroulera directement sous nos yeux, à quelques dizaines de mètres à peine de nous, s’avère une tâche impossible. Ce qui est livré ici ne se veut qu’un échantillon des innombrables réflexions, constatations, conclusions ou questionnements émergeant d’une mise en scène aux allures sacrificielles qui se perpétue depuis le 18e siècle.

Ce qui m’a d’abord frappé, c’est que le spectacle débute sans qu’il y ait eu au préalable chant de l’hymne national. La foule ne se lève donc pas d’un seul bond pour faire trempette avec son hot-dog et sa bière devant une grosse feuille d’érable. Non, c’est le défilé des principaux acteurs (toréros, picadors, bandérilléros, chevaux) du drame qui annonce la levée prochaine du rideau. Une pièce en 6 actes de 15 minutes chacune, soit un acte par taureau. Au total, 6 mises à mort. Deux toréros ( Ivàn Fandino, 32 ans, 19 victoires en 19 combats en 2011, et David Mora, 31 ans, 41 victoires en 41combats en 2011, tous les deux possédant de « magnifiques petites fesses », comme me le confirmeront avec insistance mes deux accompagnatrices) se partagent les rôles principaux. Les costumes témoignent, par leurs couleur et leurs coupes, d’un raffinement exceptionnel. Le soleil est au rendez-vous. Il est 18h00.

Le premier taureau ne tarde pas à faire son apparition dans les arènes. Il fonce sur la première cape rose qu’on lui brandit à une cinquantaine de mètres de là. Il voit rouge et il veut tuer. Je ne sais pas par quoi il est passé avant de se présenter devant nous, mais à l’évidence il n’a vraiment pas apprécié, mais pas du tout! Progressivement, on lui présente la cape, qu’il tente de « défoncer », mais qu’il manque à tout coup. Quand on voit que la fatigue le gagne trop vite ou que son agressivité s’amenuise, on le pique au moyen de la lance (picador à cheval) ou des banderilles (bandérilléros). Le sang coule, mais ce ne sont tout de même pas les chutes Niagara.

Puis ce sera l’ultime confrontation, le face à face pour lequel 15 000 personnes (le stade peut en recevoir 24 000) se sont déplacées. Le toréro, le corps tendu jusqu’à la cambrure,  provoque l’animal en lui brandissant sa cape rouge, en l’interpellant d’un « Hé! Hé » sonore. L’animal répète inlassablement le même geste … qui le mène toujours dans le même inexplicable vide, derrière le toréro. Il en demeure littéralement gueule bée! Et c’est là que j’ai pensé à Mad Dog Vachon, le pauvre, qui n’aurait eu aucune chance contre Mohamed Ali, à moins que ce dernier ne se fut enfargé dans un de ses lacets. Les toréros, eux, n’en ont pas, des lacets! Mais, il faut faire attention! La corrida fait tout de même partie de la catégorie des « sports extrêmes ». Aussi dangereuse que la course automobile ou le ski de descente. Ne s’improvise pas toréro qui veut!


La grande finale … l’occasion pour le toréro de sortir des arènes la tête haute, le torse bombé de fierté, sous les applaudissements et les bravos de la foule. Il ne m’aura pas été donné d’assister à ce type de démonstration. Les friands de corridas aiment le travail bien fait. Ils s’attendent donc à ce que le coup d’épée du toréro porte, qu’il soit direct et fatal, que la bête s’effondre « dret là », sous leurs yeux. Ce ne fut le cas pour aucune des 6 mises à mort dont nous fûmes témoins. Pour 4 d’entre elles, le toréro dût se reprendre pour achever sa bête, tandis que pour les 2 autres, l’animal vacilla sur ses pattes pendant de longues secondes avant de s’effondrer. Dans tous les cas, on ne prend aucune chance avec la vie en la retirant de façon définitive de la bête allongée sur le sol. On lui plante tout simplement un poignard dans le cou, au bon endroit. Voilà, c’est fini, les chevaux sont déjà là pour tirer le cadavre hors des arènes, sous les sifflements de désapprobation de la foule. Moi, je n’ai pas manifesté, occupé que j’étais à prendre des photos.

-- Et la souffrance du pauvre taureau, tu ne l’as pas oubliée, j’espère, me lance Carole.
-- Moi, je ne suis pas sûr qu’il souffre tant que ça, lui dis-je. C’est vrai que les coups de lances et de banderilles le font saigner un peu. Mais comme le dit un vieux dicton du Sahel, « plaie qui coule toujours n’amasse pas mal ». Les coups qu’il reçoit doivent ressembler à des piqûres de maringouin. Pour des bêtes qui pèsent en moyenne 560 kilos, y’a rien là! Puis je me dis que si c’était si douloureux que ça, il se mettrait à beugler, non?
-- Oui mais, la lame qui passe à côté …
-- Là, t’as un point! Ils souffrent peut-être plus qu’il n’y paraît à première vue. Mais ça ne dure pas une éternité. Et si on parlait des abattages qui se font selon certains rites religieux?

Sur ce, on a quitté les arènes pour aller manger en ville. J’ai fait remarqué qu’en aucun moment durant la corrida, un vendeur n’était venu nous casser les oreilles avec ses « chips/hot-dog/cold beer/froide bière ». Vraiment, ces gens-là font preuve d’un très grand respect pour leur patrimoine.

-- Je me demande bien ce qu’ils vont faire avec leurs 3400 livres de viande fraîche, se questionne Carole, à voix haute.
-- Tout compte fait, mon Richard, crois-tu que la Catalogne a bien fait d’interdire les corridas? s’enquiert Joëlle.
-- J’hésite à te répondre là-dessus. La seule chose qui me vient à l’esprit à l’instant-même où on se parle, c’est ce qu’un Catalan me disait l’autre jour … « Avorreixo la carn de bou massa cuita ». Et maintenant, que diriez-vous d’un bon steak?

Ricardo, cor de bou.















lundi 26 mars 2012

Le frigo était vide…



C’est au cœur de PobleNou, quartier où nous logeons, que nous faisons habituellement nos emplettes. Pour nous y rendre, nous traversons d’abord un petit parc où trônent deux magnifiques palmiers abritant quelques familles de perruches qui se font un honneur de nous chanter la pomme lorsqu’on passe sous leur nez.


Une centaine de mètres plus loin, nous pénétrons dans la Carrer de l’Amistat, petite rue bordée de mandariniers dont l’abondance et l’éclat de leurs fruits étonnent et font sourire.

Premier arrêt : le marchand de journaux, où l’on peut se procurer un journal français, soit Le Monde, Le Figaro ou Libération.

Puis, nous nous arrêtons quelques minutes à la Vinoteca, question de cueillir quelques bouteilles de vin catalan (dont le fameux cava) pour rendre plus savoureuse notre éventuelle lecture des quotidiens que nous avons sous le bras.

Quelques pas plus loin, notre marchande d’olives et de morue dessalée nous reçoit avec son sourire habituel.
Enfin, ce sera le Mercat où se fera le gros de nos provisions. On y retrouve, au rez-de-chaussée, des étals de poissons et fruits de mer, de charcuterie (dont le fameux jambon ibérique), de fromages, de viandes ou de légumes. Ces lieux, d’une propreté exemplaire, baignent dans une atmosphère empreinte de cordialité. Les gens qui les fréquentent à l’évidence se connaissent, car les sourires n’en finissent plus de jaillir, qui devant une femme heureuse de faire découvrir la nouvelle et prometteuse rondeur de son ventre, qui devant ce bel enfant assoupi dans la poussette que fait rouler son fier grand-père.
C’est à l’étage du Mercat que nous nous rendons (en ascenseur) pour acheter le reste … céréales, lait, savon, chandelles, etc,. Pensez à un IGA, mais en beaucoup plus petit. Mais, là aussi, les gens sourient, y inclus les employés.

Au retour, notre panier-charriot bien rempli, nous nous arrêtons quelques minutes pour faire la bravade au soleil et siroter un petit verre de vin blanc en ayant une pensée bourrée d’affection pour ceux et celles qui nous manquent … dont MAB!


lundi 20 février 2012

On n'était pas d'accord

Elle voulait aller vers le nord et moi vers l’est. On a tiré au sort, et c’est elle qui a gagné. Comme d’habitude! Le nord, c’est dans la direction de la France, en longeant la Méditerranée. Mais, malgré la rapidité de nos pas et l’énergie emmagasinée dans nos mollets, il n’était pas question de nous taper les 200 kilomètres qui nous séparent de la frontière. On se dirige donc vers le parc Del Forum.

Elle marchait derrière moi, lentement, because une sensibilité à la hauteur de sa cuisse droite.
Distance parcourue? Environ 6 kilomètres! Quand même pas mal pour un gars davantage porté à jouer du clavier … Quant à sa compagne, eh bien, on pourrait affirmer sans se tromper qu’elle connait par cœur chaque trottoir de Rosemont .

Et qu’avons-nous retenu de cette petite ballade concoctée par le hasard?

  • D’abord, l’espace! De nouveau, on ne s’est pas une seule fois senti «serrés»! De l’espace … pour marcher, pour courir, pour faire du cyclisme, du jogging, du patin à roues alignées, pour se minoucher à volonté,  etc, … il y en a! D’ailleurs, j’ai dû, plus d’une fois, retenir Carole dans ses élans affectueux, sa cuisse gauche commençant, à son tour, à faire des siennes! Et ici, personne ne se marche sur les pieds! 5000 enfants pourraient jouer à la marelle, en même temps, sur les quelques kilomètres de promenades qui longent la mer, sans embêter qui que ce soit!


  • Et ces parcs plantés ici et là, avec leurs glissoires et leurs bancs au design si innovant.
  • Ensuite, il y a tout ce beau monde qui vaque calmement à ses occupations! Et ces enfants qui n’en finissent plus d’être magnifiques et heureux! Ils ont littéralement le bonheur inscrit dans le sourire et dans les yeux. En Catalogne, la famille constitue la partie la plus précieuse du patrimoine national. Et ça se voit. Les parents, les grands-parents distribuent ouvertement et sans réserve leur affection aux générations qui les suivent. On ne sent pas qu’on a affaire à des enfants gâtés, «rechigneux», revendicateurs. Pas de pleurs ni de cris, ou si peu, devant un comptoir de gomme baloune, de toutous ou de je ne sais quoi encore qui puisse exciter leur convoitise. Les pères semblent aussi très présents dans le développement de leur progéniture.


  • Et cette mer dont le bleu se fond si souvent, si harmonieusement, dans celui du ciel … et des yeux de Ricardo (dixit Carolinetta!)


  • Il y a aussi ces palmiers, pétant de santé, abritant de petites bandes de perruches qui nous offrent au passage leur concert gratuit.




  • Que dire de ce gigantesque ensemble de plaques photovoltaïques sous lequel, silencieux mais légers, on s’est pris par la taille en fixant un horizon lisse et placide.


  • On s’est arrêtés devant une marina aux lignes effilées, où grands et petits bateaux, sagement endormis les uns contre les autres, semblaient tout ignorer de la lutte des classes. Nous y avons même vu le petit voilier de Denis P. se blottir contre le «transatlantique» de Robert G.


  • Et encore des bancs, de toutes formes et couleurs, qui invitent à la détente, au repos, à la réflexion, au rêve. Elle a dit : « arrêtons-nous », et j’ai glissé ma main sur sa cuisse endolorie. Et j’ai pensé à cette glissoire que j’avais croisée plus tôt, si invitante!


  • Et enfin, ces fascinantes grappes de buildings aux coloris inhabituels mais harmonieux, qui vous donnent la sensation de vous trouver à l’intérieur d’une gigantesque galerie d’art aux murs couverts d’oeuvres contemporaines!


Et elle m’a soufflé à l’oreille … «J’ai envie de faire …». Le bruit d’une sirène a noyé ses dernières paroles. J’ai acquiescé avec un sourire rempli de tendresse. Puis elle m’a dit … «Regarde … y’a un McDo là-bas. On pourrait y aller. Ils ont des toilettes.»

 Ça m’arrive, à moi aussi, de me tromper, de prendre mes désirs pour la réalité. Mais au moins leur café était buvable. Et il y eut enfin ce carré de fleurs jaunes pour nous rappeler que nos pissenlits allaient éclore bientôt chez-nous, dans un peu moins de 4 mois! 








Une journée inoubliable. Une autre de plus!
Nous étions le jeudi 16 février, le lendemain de l’anniversaire de George, mon petit-fils.

Ricardo, corazon de pantera negra.


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mardi 14 février 2012

Près de chez-nous, il y a la mer

Près de chez-nous, dans le quartier Poblenou, mais vraiment tout près, à deux pas d'ici, (à toutes fins pratiques, il suffit de traverser le boulevard), il y a la mer. 

Par ce beau dimanche après-midi - nous sommes le 22 janvier -, nous allons nous y promener. Il fait un temps splendide, plein soleil, c'est même chaud, proche de 20 degrés.

Tout au loin, nous apercevons une immense tente blanche qui étire sa toile le long d'une mer paisible. Curieux, nous nous approchons. Pour y découvrir qu'elle héberge le Cirque du soleil. Quel plaisir de voir notre cher fleurdelisé battre fièrement au vent, au côté du drapeau de la Catalogne! 





On nous informe que la levée du rideau de Corteo est dans peu de temps. Quelques billets sont encore disponibles, mais aux premières loges seulement. Allons-y pour une première folie «catalognaise»! Une décision que nous ne regretterons pas. La magie opère rapidement. Le spectacle est tout simplement MAGNIFIQUE ! Dans la foulée de Fellini et de son exceptionnel «8 1/2». Une grande poésie ... toute athlétique!
 











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Promenade du dimanche


En Espagne, les dimanches sont sacrés. Ils sont vraiment jours de repos. Et à Barcelone, on semble adorer prendre l'air.

Plusieurs kilomètres de promenades invitantes suivent la mer. Nombreux sont celles et ceux, jeunes et moins jeunes, qui y pratiquent la marche, le jogging, la bicyclette, la trottinette ou le patin à roues alignées. Impressionnant à voir!



Bref, on se met le nez dehors, on fait de l'exercice. Ici, l'obésité n'a vraiment pas la cote! Au moment d'écrire ces lignes, nous venons tout juste de terminer une longue marche de trois heures, chose que nous ne faisons jamais à Montréal!

Fins aviat.



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